Vous êtes ici

Et si, pour produire de l’hydrogène vert (sans émission de gaz à effet de serre), on s’inspirait de la nature? Voilà exactement la question qui mobilise la start-up H2WIN, basée à Nivelles. Avec le concours de partenaires privés et de laboratoires universitaires, elle mise sur le biomimétisme pour produire de l’hydrogène «propre».

«Actuellement, pour produire de l’hydrogène au départ de l’eau par électrolyse, les dispositifs utilisés misent sur des catalyseurs dopés aux métaux précieux, en particulier le platine», explique le Dr Lionel Ventelon, directeur des opérations chez H2WIN. « En bout de chaîne, pour ensuite transformer cet hydrogène en électricité, afin par exemple d’alimenter des véhicules électriques via une pile à combustible, les membranes utilisées sont également dotées de platine comme agent catalyseur. Ce que nous proposons, c’est d’utiliser des enzymes pour faire le travail de catalyse à la place du platine. Une substitution durable, parce que les enzymes sont faciles à produire localement. Une solution qui présente donc aussi des avantages géostratégiques. Notre système permet de ne plus avoir recours au platine, dont les deux principaux producteurs mondiaux sont l’Afrique du Sud et la Russie.»

Le biomimétisme comme source d’inspiration

L’entreprise nivelloise propose donc de remplacer un métal rare par certaines enzymes, d’une part pour produire de l’hydrogène et d’autre part, pour produire ensuite de l’électricité. Une initiative qui trouve son origine dans le biomimétisme.

La nature produit de l’énergie au départ du Soleil», rappelle le Dr Philippe Lorge, fondateur d’H2WIN. «Lors de la photosynthèse, il y a absorption de l’énergie lumineuse par des enzymes, des protéines capables de catalyser des réactions chimiques. Nous souhaitons faire exactement la même chose: disposer d’un système qui produit directement de l’hydrogène au départ de la lumière du Soleil.»

Résoudre le problème de l’accrochage des enzymes

Dans un premier temps, son entreprise a surtout travaillé sur les enzymes d’intérêt. Elles sont désormais identifiées. « Nous développons une première génération d’enzymes qui utilisent du courant électrique pour fabriquer de l’hydrogène ou inversement qui, à partir d’hydrogène, fabriquent du courant électrique via une pile à combustible », reprend le chimiste Lionel Ventelon, lors d’un déplacement à Aix-la-Chapelle (Allemagne). Un voyage chez des voisins proches qui était organisé par Wallonie-Bruxelles International à l’attention des scientifiques et des entrepreneurs wallons de la filière. Son but: rencontrer les acteurs et les chercheurs actifs dans le domaine de l’hydrogène en Allemagne en vue d’éventuels partenariats et mises sur pied de projets de recherche communs.

«Nous travaillons maintenant à l’intégration de ces enzymes dans des matériaux destinés au monde de l’industrie et de l’énergie», détaille-t-il. «L’idée étant clairement d’intégrer nos enzymes en lieu et place du platine déposé sur les membranes des piles à combustible». Une des problématiques sur laquelle travaille l’entreprise avec ses partenaires privés et académiques porte sur « l’accrochage » de ces enzymes sur les membranes en polymères de ces piles.

«Nous disposerons en 2025 d’un pilote, d’un prototype fonctionnel», indique le Dr Ventelon. «Après ce prototype, il faudra développer le système afin de le rendre industrialisable. C’est-à-dire développer un système qui utilise des outils industriels déjà disponibles pour la production de membranes en platine dans lesquels nous remplacerons le métal par notre solution enzymatique. Nous pensons que les modifications à apporter aux systèmes de production pour passer aux enzymes seront minimes, ce qui représente encore un autre avantage de notre technologie.»

Sans parler des coûts de production. «Les enzymes qui devraient être produites en Wallonie coûteront nettement moins cher que le platine. Et le rendement des piles à combustible fonctionnant avec des membranes enzymatiques devrait également être nettement plus important que celles utilisées actuellement», conclut-il.

Source : article de Christian Du Brulle pour Daily Science avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International.

Pages